Les cérémonies de mariage : Fontarabie et Saint-Jean-de-Luz
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Le 3 juin 1660, le mariage par procuration a lieu à Fontarabie, en Espagne, car selon la tradition espagnole l’Infante devait quitter l’Espagne mariée. Philippe IV assiste à ce mariage, en l’absence de Louis XIV, ce dernier ayant donné une procuration à Monsieur de Fréjus, remise à Don Luis de Haro pour que ce dernier représente le roi de France. Mademoiselle de Montpensier assiste au mariage en l’église Santa María de la Asunción y del Manzano de Fontarabie, et rapporte cet événement dans ses Mémoires]. La cour d’Espagne loge au Château de Charles V.
Vélasquez, en tant qu’aposentador royal se chargea de préparer les logements du roi d'Espagne et de sa suite à Fontarabie et de décorer le pavillon de la Conférence où était organisée la rencontre de l'île des Faisans. Le travail dut être épuisant car à son retour, Vélasquez contracta une maladie virulente.
L’île des Faisans ou île de la Conférence
Le 4 juin, Louis XIV envoie son présent à Marie-Thérèse. À deux heures de l’après- midi, la Reine de France arrive à l’île de la Conférence avec Monsieur. Le roi d’Espagne et l’infant s’y rendent aussi. Anne d’Autriche, le reine mère, retrouve son frère Philippe IV : ils ne s’étaient pas vus depuis 25 ans. Louis XIV arrive incognito pour voir Marie-Thérèse.
Le 6 juin fut l’entrevue des deux rois pour la signature de la Paix des Pyrénées dans le somptueux pavillon de l'île des Faisans, qui fut aménagé en deux parties identiques, une pour l’Espagne et l’autre pour la France, et richement décoré pour la rencontre des deux souverains : « La tapisserie du côté de l’Espagne étoit admirable, et du nôtre aussi. Les Espagnols avoient par terre, de leur côté, des tapis de Perse à fond d’or et d’argent qui étaient merveilleusement beaux. Les nôtres étaient d’un velours cramoisi, chamarrés d’un gros galon d’or et d’argent. Pour les chaises, je ne me souviens pas comment elles étaient faites. Il y avait deux écritoires : je ne me souviens pas bien non plus de quelles matières elles étoient : il me semble que les serrures étaient d’or, et si je ne me trompe, il y avoit deux horloges sur chaque table, tant tout y étoit égal et bien mesuré. » (Extrait des Mémoires de Madame de Montpensier, cousine de Louis XIV).
Ils jurèrent la paix et la signèrent ; ils avaient chacun leur livre d’évangile, leur table, leur écritoire, et ne se servirent pas du même crucifix, chacun ayant le sien en main. La paix signée et jurée, Mazarin fit le signal : il ouvrit la fenêtre du cabinet au bout de la salle de la conférence. Monsieur de Maupeoux, major du régiment, fit faire la décharge et recharger trois fois. La décharge des Espagnols répondit de l’autre côté de la Bidassoa autant de fois.
« On peut juger de ce qu’était Saint-Jean-de-Luz la veille du mariage royal : une capitale improvisée ou plutôt transplantée sur les bords de l’océan avec ses magnificences. De fait, tout Paris, grands seigneurs et beaux esprits, s’était donné rendez-vous au pied des Pyrénées. Ici, d’élégants cavaliers assiégeaient un carrosse chargé de dames, là, quelque fin lettré rédigeait un madrigal, ou discourait avec un maréchal de France ; plus loin un groupe d’évêques tenait un synode en plein air. C’était, au demeurant, moins une installation qu’une sorte de campement. Le contact journalier entre gens séparés de leurs habitudes et logés, dans l’acception propre du mot, à la même enseigne, établissait une égalité provisoire qui adoucit les rigueurs de l’étiquette et amoindrit la distance des rangs. » (Extrait du Mariage de Louis XIV, d’après les contemporains et des documents inédits, par Edouard Ducéré)
Bénédiction à l’église Saint-Jean-Baptiste
Le 9 juin, à midi, pendant que le canon tonne, que les cloches sonnent à toute volée, le cortège royal s’ébranle, au son des joyeuses fanfares jetées dans les airs par seize trompettes qu’accompagne le tambour battant des Suisses.
Le mariage fut béni, et ratifié à Saint-Jean-de-Luz par Monseigneur d'Olce, évêque de Bayonne qui fit le déplacement en l’église Saint-Jean-Baptiste, en plein travaux d’agrandissement. L'église de Saint-Jean-de-Luz avait été reliée au logis de l'infante (en fait celui de la reine-mère où dormit l’infante Marie-Thérèse les deux nuits avant le mariage) à l'aide d'une galerie couverte élevée de deux ou trois pieds au-dessus du sol. Un régiment de Suisses et un autre de Gardes Françaises faisaient la haie de chaque côté du parcours. À midi, le cortège s’avança avec solennité : cent Suisses vêtus d’habits galonnés d’or, ayant à leur tête le Marquis de Vardes, toutes enseignes déployées, parsemées de fleurs de lys d’or ; des trompettes jouant mille airs de joyeuses fanfares, les valets de pied de la Maison du Roi, en magnifiques livrées, précédaient Leurs Majestés environnées de leurs gardes de corps, de leurs Capitaines, des gentilshommes et autres grands seigneurs de la Cour, ainsi que des dames étincelantes de parures. Le convoi se dirigeait vers l’église toute proche ; Louis XIV, dans la splendeur de sa jeunesse, s’avançait radieux. On prit place dans l’édifice et l’Evêque de Bayonne, Jean d’Olce, apporta au Roi l’anneau qu’il donna à la Reine et les pièces d’or accoutumées, dans un bassin de vermeil doré ; l’office commença au milieu des chants et des symphonies. Un évêque, Monseigneur de Valence, monta en chaire et complimenta avec éloquence le couple royal. L’église était exiguë, une douzaine de prélats assis et les ducs debout ! C’était plus qu’il n’en fallait pour déclencher les hostilités entre la noblesse et le clergé. La noblesse, soutenue par Mazarin finit par l’emporter et les évêques par s’emporter en quittant la cérémonie.
Aussitôt après le départ du Roi, la porte de l’église fut murée pour que nul ne la franchît désormais (selon certains historiens, la porte n’aurait été murée que vers 1669).